vendredi 3 juin 2016

Comment cultiver Anicca Sanna - la perception d'Anicca

traduit de l'anglais à partir de ce texte

1. Beaucoup de personnes me disent : "Je pense comprendre ce que signifie anicca...Et alors quoi ?"


Cette déclaration en soi signifie que cette personne n'a pas encore compris anicca, ou seulement jusqu'à un certain niveau. Je ne dis pas cela d'une manière péjorative. Même un Sotapanna(1) est supposé n'avoir compris anicca que partiellement. Donc, si quelqu'un peut avoir ne fut-ce qu'un aperçu de ce qu'est anicca, c'est déjà pas mal. Et ce ne pas si dur, si on est capable de simplement contempler anicca.



2. Il est vrai qu'un Bouddha est nécessaire pour indiquer la vérité basique de ce monde, à savoir : "nous ne pouvons maintenir quoi que ce soit en l'état dans ce monde en vue de notre satisfaction". Il n'est d'ailleurs pas difficile de voir la vérité de cette affirmation en l'évaluant simplement de façon critique.


Si quelqu'un doit être CAPABLE de maintenir QUOI QUE CE SOIT pour sa propre satisfaction, cela DOIT ÊTRE son corps et ses pensées, car : « Ceci est mon corps et cela sont mes pensées ». Donc, cette personne devrait commencer par contempler son propre corps et son esprit.



3. Fermez les yeux et essayez de fixer esprit sur quelque chose. Votre femme, votre mari, votre ami, votre maison, … n'importe quoi. Pouvez-vous maintenir vos pensées sur cet objet pour une certaine durée ?


Cela est impossible. Nos esprits aiment vagabonder à la recherche "d'objets de pensée plus séduisants". Vous remarquerez que c'est encore plus dur quand l'esprit est agité, par exemple, lorsqu'on a vu un objet attrayant ou lorsqu'on a fait quelque chose d'éprouvant et que l'on respire intensément (dans le premier cas kamachanda nivarana est fort et dans le second uddacca nivarana ou l'excitabilité est forte).


Donc, lorsque l'esprit est calme, il est plus facile de le garder fixé sur quelque chose mais, néanmoins, pas pour longtemps.



4. Il est important de vérifier ces exemples par soi-même. Le dhamma du Bouddha est destiné à être expérimenté, pas uniquement à être lu.


On peut cultiver la sagesse simplement en "vérifiant par soi-même si ce que dit le bouddha est vrai". La foi aveugle ne rapprochera personne de la vérité. De ce fait, la véritable méditation c'est d'apprendre le véritable et pur dhamma et de l'évaluer sur base de ses propres expériences.


5. Une fois que l'on confirme notre incapacité à conserver même notre propre esprit de la façon dont nous le souhaitons, la prochaine étape est de voir si l'on peut maintenir notre corps comme nous le voulons.


Il est évident que nous ne pouvons modifier nos caractéristiques corporelles de base comme la taille, la couleur de notre peau ou de nos cheveux, etc. De plus, si quelqu'un est né aveugle ou avec un membre en moins, il  ne peut rien y faire non plus. Donc pour l'essentiel, nous devons simplement vivre avec le corps avec lequel nous sommes né.



6. Ensuite, considérez le corps que nous avons à présent et voyez si nous pouvons le maintenir tel quel, si nous en apprécions l'apparence.


Bien sûr, nous pouvons faire cela un temps, surtout lorsqu'on est jeune. Mais il est inévitable qu'il viendra un moment où nous en serons incapables. N'importe qui peut vérifier cela en observant ses parents et  ses grands parents : regardez leur vieilles photos et voyez comment ils étaient jeunes et plein de vie à votre âge.



Donc, il nous faut contempler le fait que nous ne pouvons même pas maintenir les choses que nous considérons comme étant "les nôtres" d'une façon satisfaisante sur le long terme. Ceci va nous aider à développer "anicca sanna", la perception d'anicca à un haut niveau.



7. Au contraire de ceux qui pensent que penser de cette façon est "déprimant", il peut en fait être libérateur de prendre conscience de la vérité. C'est justement ceux qui continue d'essayer "rafistoler les pièces corporelles défectueuses" par des moyens artificiels qui finissent "gravement dépressifs" et suicidaire. Il est mieux d'avoir à l'esprit les "inévitabilités de la vie" le plus tôt possible.


Si l'on contemple cela assez profondément, nous réalisons que peut importe l'argent que nous pourrions dépenser pour de tels problèmes, au final nous serons perdant. Réfléchissez un instant à toutes ces stars du cinéma, reines de beauté, bodybuildeurs, politiciens, rois, empereur, etc. Voyez comment finalement, ils moururent tous, inévitablement.


Toute personne meure, soit inévitablement de vieillesse ou inopinément d'un accident ou d'une maladie grave. Il n'existe pas de "mort gracieuse". Il peut sembler aux observateurs extérieurs qu'une personne "vieillit avec grâce", mais cette personne sait combien cela est dur, même avec une santé normale. Elle ne peut simplement plus faire les choses de la façon dont elle le faisait et elle ne peut plus apprécier les plaisirs des sens au même degré. En effet, toutes nos facultés sensorielles se dégradent avec le temps.



8. Cela était le message de base du Bouddha, et ce n'est pas quelque chose qu'il a inventé. Il a seulement révélé la vérité au sujet de la nature de ce monde, vérité qu'une personne normale n'amènerait pas à son esprit par elle-même. Nous sommes trop occupés à profiter des plaisirs sensoriels (ou à essayer d'obtenir des objets plaisants), pour ne fut-ce que prendre le temps de penser à cela.


Le bouddha a aussi montré que, à moins de faire quelque chose pour changer cela, c'est ce que serons amener à faire pour toujours dans le futur. Nous reprendrons naissance et traverserons le même cycle, encore et encore. C'est en fait bien pire que cela, car la plupart des naissances dans le cycle des renaissances ont lieu dans les 4 plans inférieurs où les difficultés et la souffrance sont bien plus élevées.



Plus important, il a révélé un moyen de se débarrasser de ce cycle des naissances forgé dans la souffrance.



9. Le bouddha expliqua que la raison pour laquelle nous continuons à revenir dans ce monde vient du fait que nous ne réalisons pas "sa nature insatisfaisante". Peut importe combien de souffrances nous endurons, nous pensons toujours pouvoirs les surmonter ( et parfois nous y arrivons mais au final, nous mourrons tous). Nous avons la perception erronée que nous pouvons "battre le système", c'est à dire atteindre le bonheur et le MAINTENIR. Nous avons dans ce cas une "nicca sanna" (perception, conscience) incorrecte.


Il dit que aussi longtemps que nous nous avons cette "nicca sanna" nous ne pouvons pas échapper aux souffrances futures. La solution est enchâssée dans cette première vérité à propos de la souffrance (Dukkha Sacca, la souffrance pouvant être éliminée) : Ce que nous avons besoin de faire c'est de réaliser la "nature anicca" de ce monde, et que "nous ne pouvons maintenir quoi que soit sur le long terme pour notre satisfaction".

Ce que la plupart des gens ne réalisent pas, c'est que ce simple changement de perception peut alléger d'un fameux poids celui qui le portait. C'est la base des "niramisa sukha".



Ceci ne veut pas dire que l'on doivent tout abandonner et aller dans la forêt. voir, “If Everything is Anicca Should We Just give upEverything?“.



10. Lorsque nous avons cette mauvaise "nicca sanna", nous embrassons ce monde volontairement, et cela est "paticca" ("pati" : lié + "icca" : volontairement). Lorsque cela arrive, "sama uppada" ("sama": similaire et "uppada" : naissance) suit inévitablement. Voir, “Paticca Samuppada – “Pati+ichcha”+”Sama+uppäda“


Donc, nous allons prendre naissance dans l'un des types d'existence envers lequel nous avons de l'attirance.


Mais cela ne veut pas dire que si nous désirons une naissance humaine, nous l'obtiendrons. Plutôt, la naissance a lieu en fonction de "gati", l'aspect clé de l'esprit d'une personne. Si quelqu'un est extrêmement avide, il peut naître dans le plan des "esprits affamés", si quelqu'un est excessivement en colère ou rempli de haine, il prendra naissance là où cet esprit prévaut, c'est à dire dans le "niraya" (enfer).


Pour le dire autrement, lorsque une personne à la mauvaise "nicca sanna", elle a tendance à faire des choses immorale pour obtenir ce qu'elle perçoit comme une source de plaisirs. Ensuite ces "kamma vipaka" mèneront à de pires existences futures, non seulement dans cette vie mais aussi, et de façon plus importante, dans les vies futures.


11. Alors qu'une personne cultive "anicca sanna", elle commence à se tenir de plus en plus à l'écart des 10 actions immorales du fait de la claire compréhension que de telles actions ne sont pas profitables ou fructueuses.



Quel est l'intérêt de voler de l'argent au détriment des autres et d'acquérir un "bon train de vie" qui ne durera que 100 ans tout au plus ? Et on doit rembourser cela avec les intérêts ?


Quel est l'intérêt de maltraiter quelqu'un verbalement pour éprouver une satisfaction temporaire, si cela ne fait que nous blesser au final (juste par le fait de laisser quelqu'un en proie à l'agitation, sans compter les kamma vipaka qui viendront plus tard) ? Si une personne arrive à s'efforcer de stopper un tel incident, alors elle peut voir après coup l'effet apaisant résultant de cet effort. C'est de "anapana" ou "satipattana" dont il s'agit ici.



Même si une personne vous frappe, quel est l'intérêt de frapper en retour ? Allez vous vous sentir PHYSIQUEMENT mieux en blessant cette personne ? Votre douleur corporelle va-t-elle s'en aller ? D'ailleurs, cet événement ne s'est pas non plus produit sans une cause, c'était le résultat (un kamma vipaka) d'un mauvais kamma fait quelque temps auparavant.


À ce sujet, les kamma vipaka ne sont pas guarantis. On peut éviter beaucoup de kamma vipaka en empêchant les conditions qui les feraient avoir lieu. Donc, lorsque quelqu'un mène une vie avec "sati", beaucoup de ces kamma vipaka peuvent être évités. voir “What is Kamma? – Is Everything Determined by Kamma?“



12. Cela peut demander une certaine contemplation pour comprendre tout cela mais il faut toujours garder à l'esprit la chose dans son ensemble. L'ignorance, c'est ne pas être conscient de "l'ensemble". Nous avons tendance à agir impulsivement avec ce que nous discernons à ce moment là. Mais cette tendance va diminuant lorsque l'on cultive "anicca sanna".


Agir avec "sati" ou "être conscient, présent", c'est être conscient de la "nature anicca de ce monde". Ceci est la base à la fois de "anapana" et "satipattana".


Nibbana ou le "retour" au calme" peut être expérimenté dans cette vie même, en cultivant "anicca sanna", motivé par l'effort.


(1) Sotapanna : celui qui est "entré dans le courant", le courant étant le dhamma. Tel le courant conduisant irrémédiablement à la mer, le sotapanna suit le dhamma pour inévitablement aboutir au nibbanna. Le sotapanna à atteint le premier des quatres niveau d'éveil, après lequel il a la certitude d'atteindre le but final dans cette existence ou au plus tard dans l'une des 7 suivantes.